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Photo du rédacteurCousty Philippe

Un Rapport diffamant

Un rapport diffamant !

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Solenne Albert

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La commission de lecture de textes de loi de l’association des psychologues freudiens, qui s’est constituée au mois de février, est composée de trois groupes d’études qui se mettent au travail afin de vous inciter à lire le rapport révoltant de l’académie de médecine, datant du mardi 18 janvier 2022 et intitulé : « Psychothérapies : une nécessaire organisation de l’offre. ». Nous vous proposons, au fil de notre NL, une série de parutions spéciales « Rapport de l’académie de médecine ». Cette série présentera une analyse critique détaillée, point par point de ce rapport calomnieux qui s’attaque, comme en 2005, avec l’amendement Accoyer, au titre de psychothérapeute et à celui de psychologue. Ce rapport est à lire absolument car il est dangereux pour l’avenir de notre profession. J’en trace ici les grandes lignes. Tout d’abord, ce rapport, qui est composé de 17 pages, est dangereux parce qu’il provient de la prestigieuse Académie de médecine, chargée de répondre aux demandes du gouvernement sur tout ce qui intéresse la santé publique. C’est elle qui conseille le gouvernement. Héritière de l’académie royale de chirurgie, fondée en 1778 sous Louis XVI, l’académie a réuni les médecins les plus renommés de l’histoire de France (onze prix Nobels). Son statut est particulier car elle est placée sous la protection du président de la République. « Elle a pour mission de répondre, à titre non lucratif, aux demandes du gouvernement sur toute question concernant la santé publique et de s’occuper de tous les objets d’étude et de recherche qui peuvent contribuer aux progrès de l’art de guérir. » Ses rapports sont donc considérés par le gouvernement, qui s’appuie sur eux pour concevoir projets de lois, amendements, décrets et arrêtés. Or, la perception des psychothérapies et du métier de psychologue est vue, selon ce rapport, comme « porteuse d’ambiguïtés », ce qui conduit à faire planer un climat délétère de méfiance sur toutes les pratiques de parole. L’objectif de ce rapport, clairement affiché, est de faire du psychologue un professionnel de santé, dont la formation devra être profondément repensée – afin d’en faire un exécutant, chargé de modifier de simples « dysfonctionnements » psychiques. A chaque « trouble » devrait correspondre une thérapie spécifique ! « Les entretiens motivationnels pour les troubles addictifs, la remédiation cognitive pour les troubles psychotiques, l’hypnose pour les pathologies douloureuses, les TCC pour les phobies, les TCA ou les états dépressifs d’intensité modérée, la méditation pour les troubles émotionnels. »… Ce rapport infantilise les patients et nie leur singularité, en les transformant en clones qui devraient bénéficier – à troubles identiques – de remèdes identiques. Toute la souffrance psychique est abordée sous l’angle du moi et de sa prétendue rééducation – l’inconscient est rejeté, c’est-à-dire forclos. Il n’est question que de motivation du patient – jamais de ce qui se répète et qui ne peut pas guérir. Nous ne serons pas transformés en « praticiens du bien être psychologique » ! La théorie freudienne y est honteusement réduite au rang de simple pratique d’écoute empathique, soupçonnée d’alimenter la plainte des patients… « La croyance en la toute-puissance de l’écoute de la plainte est un risque à ne pas négliger » La psychanalyse reléguée au même rang que la méditation et l’hypnose, passe pour une secte, composée « d’adeptes » bornés refusant les évaluations scientifiques de leurs pratiques. Ces insinuations sont calomnieuses et injurieuses ! De plus, elles méconnaissent les efforts très réels qui ont été faits ces dernières années pour faire valoir l’efficacité de nos interventions. Le libre choix de son psy n’est pas vu comme articulé à un lien social que l’on nomme transfert – mais comme une « étape cruciale pour un parcours de soins qui doit garantir le choix de la meilleure modalité de traitement pour corriger les dysfonctionnements psycho-comportementaux. » Tout ce qui fait que l’on choisit son thérapeute, non pas sur une liste informatisée, mais par le transfert, le bouche à oreille, les recommandations… tout cela est mis au banc. On peut se demander si les auteurs du rapport suivraient le « parcours de soins » qu’ils préconisent s’il s’agissait d’un de leurs parents ou d’eux-mêmes. Exit la dimension de symptôme – et son nœud de souffrances à déchiffrer – le patient n’est plus porteur que de « dysfonctionnements » que le psy se verra charger d’éradiquer – et le plus vite possible ! Et surtout pour « justifier une prise en charge par la solidarité nationale », il faudra « évaluer chaque type de psychothérapie et en préciser mieux les indications » puisque « la question des déterminants d’efficacité d’une psychothérapie est posée. » Le point E : formation et droit au titre est inadmissible. Il s’acharne spécifiquement sur le métier de psychologue clinicien. Notre diplôme est considéré comme insuffisant : « Il n’existe pas de maquette nationale pour la formation des futurs psychologues », alors qu’il en existe une pour les futurs psychiatres. Ce rapport attaque ouvertement toutes les universités délivrant le diplôme de psychologue clinicien. « Le cadre de formation des psychologues est hétérogène et peu lisible pour les autorités sanitaires », et « le titre de psychologue clinicien est employé sans cadre établi. » Pour prétendre au titre de psychothérapeute, ce rapport préconise : la mise en place, comme en médecine, « d’un internat clinique d’un an au moins pour les futurs psychologues. » Nous ne sommes pas des soldats du soin psychique ! Nous ne considérons pas les patients comme des machines nécessitants « une mise à jour des modes de pensées perturbateurs » ! Notre formation, qualifiante, tend à devenir permanente, sitôt que nous nous engageons dans la pratique. L’Association des psychologues freudiens fera entendre, dans ses prochaines newsletters, son analyse critique et argumentée de ce rapport qui dénigre le métier de psychologue clinicien, ainsi que toutes les pratiques de parole. Nous refusons que soit proposé – comme modèle de recommandations à notre gouvernement – un tel rapport diffamant !

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